Quatrième de couverture

 

Ce n'est certes pas un hasard si le héros de ce livre porte le nom insolite d'Adam Pollo. Adam, c'est ici à la fois le premier et le dernier homme, celui que la folie ou l'oubli, ou encore la volonté obscure de tenter une expérience extrême, isole du reste des vivants, change en vivant survolté devant qui le monde cède à la féerie et au cauchemar. Adam Pollo fait retraite dans une maison abandonnée, sur la colline, loin de la ville et de l'ordre incompréhensible qui s'y trame. Est-il déserteur ? Evadé d'un asile psychiatrique ? D'étranges rapports, brutaux et complices, le lient à une jeune fille, Michèle, qui semble lui servir d'indicatrice et de réplique involontaire. Mais surtout, après avoir franchi un certain état d'attention obsédée, Adam descend dans le monde, comme un prophète. Dès lors, sa vie se trouve mise en rapport avec la Vie même, animale, matérielle, inaperçue. Il devient la plage où il passe, le chien qu'il suit, le rat qu'il tue, les fauves qu'il observe dans un parc zoologique, le grand mouvement inlassable des apparences. Fabuleux itinéraire dans l'espace et la simultanéité de l'imagination qui l'amène fatalement à être rareté et jugé par les hommes dont il a voulu, nouvel Adam infernal, transgresser les interdits : il sera donc fou, c'est à dire enfermé dans la région infinie des mirages rigoureux. Par ce premier roman explosif, d'un lyrisme retenu ouvrant sur une sorte d'épopée qui évoque à la fois William Blake et Les Chants de Maldoror, J.M.G. Le Clézio s'est révélé d'emblée un écrivain, un voyant extraordinaire.

Jean-Marie Gustave Le Clézio
1963